Antisionisme et antisémitisme
Présent
à la conférence, le militant juif Jonathan Kramer a déclaré à Métro que
l’analyse des commentaires du candidat était trop poussée.
«Les
Israéliens célèbrent la libération de leurs soldats dans les
prisons palestiniennes, donc il n’y a rien d’antisémite là-dedans»,
a-t-il soutenu concernant les propos de M. Guillet sur la libération
de Raed Salah.
M.
Kramer, un proche ami de M. Guillet, milite pour le rapprochement
interreligieux. Il estime que les critiques de B’nai Brith, qui
qualifie les propos de M. Guillet comme étant antisémites et
anti-israéliens, sont «complètement ridicules».
«Dire
qu’Israël pratique l’apartheid constitue de l’antisémitisme»,
fait-il valoir en entrevue, ajoutant qu'il est faux de faire un tel
parallèle avec l'Afrique du Sud.
Le
Directeur du Centre consultatif des relations juives et
israéliennes (CIJA), David Ouelette, croit que la critique d'Israël
franchit souvent le seuil de l'antisémitisme. Selon lui les
affirmations de M. Guillet concernant le pouvoir sioniste sont
«tributaires de la propagande antisémite classique accusant les
Juifs d'exercer un pouvoir occulte qui dominerait le monde».
Une définition contestée
Cette
définition considère entre autres que le refus du droit à
l’autodétermination des Juifs, par exemple affirmer que l’existence
de l’État d’Israël est le fruit d’une entreprise raciste, est
antisémite.
De
son côté, l’organisme Voix Juives Indépendantes Canada (VJI) a une
posture différente. Dans une campagne intitulée noIHRA, l’organisme
canadien soutient que la définition de l’Alliance internationale de
la mémoire de l’Holocauste est trop vague et peux facilement être
mal interprétée. La campagne de VJI soutient que la définition a
été adoptée pour assimiler les critiques d’Israël à l’antisémitisme
et interdire le soutien des droits des Palestiniens.
Pour
l'historien de l’Université de Montréal, Yakov Rabkin, cette
définition ne prend pas en compte la pluralité des voix juives et
la réalité palestinienne.
«On
peut être contre l'état sioniste sans être antisémite. [...] C'est
vrai qu'une grande partie des Juifs d'aujourd'hui sont sionistes.
Mais est-ce que cette opinion politique peut servir de base à la
définition de l'antisémitisme?», s'interroge-t-il.
Le
professeur d'histoire et auteur de livres portant sur le judaïsme
pense aussi que l’expulsion du candidat Guillet n’est pas légitime.
Elle renforce, selon lui, l'idée que toute critique de l’État
d’Israël «est dangereuse pour votre carrière».
Le PLC critiqué
Voix
Juives Indépendantes Canada a condamné la révocation de la
candidature de Hassan Guillet par le parti libéral. Le porte-parole
de l’organisme, Corey Balsam, ne croît pas que la déclaration de M.
Guillet concernant l’apartheid israélien est antisémite, mais
constitue plutôt une critique d’Israël. Quoiqu’il ne soutient pas
les propos de M. Guillet, M. Balsam estime que le candidat avait un
dialogue interreligieux et qu’il a principalement été écarté parce
qu'il était critique envers le gouvernement israélien.
«C’est
très légitime de critiquer quelqu’un comme Jared Kushner qui a des
positions de droite sur Israël et a beaucoup d’influence sur
l’administration Trump. [...] Pour nous, c’est illégitime
d’associer ce commentaire à l’antisémitisme», fait-il valoir.
Selon
une source d’une organisation juive de Montréal qui préfère rester
anonyme, il n’y a pas de consensus au sein des communautés juives
sur l’antisionisme et l’antisémitisme. Elle convient toutefois que
les organismes interpellés sur ces questions ont souvent un point
de vue unilatéral sur les questions israéliennes.
«On
s’attend à ce que les minorités aient un consensus et c’est une
forme de stéréotype parce qu’on ne s’attend pas à cela de la part
de la majorité. Pourquoi est-ce qu’il y aurait une seule
interprétation d’une problématique lorsqu’une minorité est
concernée», renchérit-elle.
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